Scène galante

Eustache, artiste en devenir, arpentait les rues du Quartier latin et rêvait de pénétrer dans les salons littéraires de Mesdames de Rambouillet ou de l’Espinasse. À la mode en ce siècle des Lumières, il se passionnait pour la philosophie … mais à sa façon. Lui, c’est à la lumière blafarde de la taverne qu’il philosophait, tout en avalant de la piquette aromatisée aux épices. Contrairement à Montesquieu, il ne conversait pas avec ses groupies. Il ne côtoyait pas non plus des courtisanes, ni même des filles de joie ; il se contentait de ribaudes à l’haleine vinassée.

Pour leurs noces de froment, Honorine, tout en élégance et légèreté, voulait passer une soirée idyllique et avait amoureusement enfermé le damoiseau pour l’occasion. La jeune bourgeoise avait mis les petits plats dans les grands, et des fruits frais ajoutaient une touche de sensualité. Elle avait déniché un premier cru qu’on ne servait pas dans les gargotes parisiennes.

Dans cette ambiance rococo, les joues rougies par l’alcool, Eustache fanfaronnait, jouait la Commedia dell’arte avec sa toque à plume et alla jusqu’à découvrir, d’une main audacieuse, un sein de sa bonne dame sous sa robe en lustrine. Le vin, qui marquait aussi son visage pâle, poussait Honorine à n’écouter que son cœur. Femme de son époque, la tolérance aux infidélités conjugales était de mise. Mais avant un dernier verre, elle l’avertit : « Si tu me trompes encore une fois, je te coupe la chique ! »

Peinture : Scène galante- Jean-Marc Nattier

Mathieu Capdegelle – Septembre 2024

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